L'INTERDIT - GESTION DU DEUIL

Publié le par ZABOU

Le décès d'un être cher peut constituer une épreuve physique, morale, humaine révélatrice de la capacité d'un être humain à surmonter ses angoisses personnelles, ses peurs et son appréhension de la mort.

La résilience donne à chacun de nous les ressources nécessaires pour l'analyse de cette étape cruciale durant laquelle le deuil engloutit, absorbe tout l'individu.

Comment transposer ses émotions et valoriser la disparition d'un être cher sinon en se remémorant les événements, les émotions, les souvenirs, les instants de bonheur partagés avec le disparu ?

Après un deuil, une course effrénée aux démarches administratives monopolise votre attention et, soudainement, vous songez instinctivement à garder tous les effets personnels et intimes qui vous liaient à l'être cher, comme pour maintenir ce lien affectif définitivement à jamais brisé.

C'est alors que vous vous dîtes : "comment aurait-il aimé que je fasse cela ?", "que dois-je privilégier ?", "quelle mémoire dois-je transmettre aux proches, aux survivants ?", etc ....

Agir en son âme et conscience, écouter son coeur, anoblir cette absence et se reconstruire.

La voie que j'ai finalement choisie fut la fidélité à sa mémoire, la poursuite d'un sillon, d'un chemin déjà façonné par la voie paternelle.

En essayant de construire ma vie d'adulte, d'ajuster ce sentiment d'orpheline pour pallier l'abscence, le vide, la solitude.

Comment mon père faisait-il pour aimer la vie alors qu'il était lui-même orphelin, sans oncle, sans tante, sans famille ?

Aujourd'hui, cette situation analogue se présente à moi et je ne m'étais jamais posée ce genre de question auparavant. La réponse reste d'ailleurs toujours en suspend ....

Alors, il faut braver les interdits de la société du XXIème siècle. Dans ce siècle qui prône la communication, le relationnel, le copinage, le déballage d'une vie privée, oser dire NON et affirmer sa souffrance, sa volonté de faire son deuil, de ne pas "nihiler" la mort et en parler relève de l'impopularité.

La gravité des circonstances estompe l'insouciance, la frivolité, la futilité.

Pourquoi s'interdire de paraître en public les yeux gonflés, les traits tirés, le regard creux et aveugle ?

Tout d'un coup, le choix d'une stratégie de non-conformité avec la société actuelle devenait évident et comblait un vide affectif, une déchirure.

2003. Quattre chiffres qui résonnent comme une mort lente, une étape forcée, contraignante où l'obligation d'assumer ses responsabilités est contraire à son émotionnel.

Alors, petit à petit, une idée germa .... La volonté de valoriser mes racines paternelles et de trouver en cela les ressources nécessaires pour continuer mon destin terrestre.

Et si, en me plongeant dans mon histoire familiale, je retrouvais mon harmonie, mon accord parfait, ma coquille et me procurait ainsi ce fameux baume au coeur si cher à mon âme ?

J'entrepris alors des recherches généalogiques ; je découvris des destins passionnants et donnais à mon histoire ce fameux ancrage familial nécessaire pour appréhender la réalité contemporaine ...

ARTUR-COURTOIS, deux noms qui sonnent comme par magie et qui sont évocateurs d'harmonie, de complicité, d'amour et de respect.

Mon grand-père était Pharmacien 1ère Classe à Brest en 1914-1918 et, durant la première guerre mondiale, offrait généreusement ses médicaments sans contrepartie financière.

Durant la seconde guerre mondiale, à Quimper, il réitéra cette éthique professionnelle, assisté de mon père. Tout naturellement, celui-ci s'inscrivit à la faculté de pharmacie à Strasbourg puis en Indochine.

1939-1945 .... 1945-1954. Quinze ans de guerre durant lesquels mon père a assumé son rôle d'Infirmier militaire, oeuvrant auprès de ses compagnons de guerre et accomplissant son devoir de citoyen français.

Jamais il n'a renoncé ; jamais il n'a cédé aux tentations de fuite, de désertion. Toujours assumer et trouver en lui-même les valeurs de courage, de bravoure en conformité avec son éthique personnelle.

Aujourd'hui, le souvenir d'un homme attaché à ses valeurs, à son devoir de citoyen, à son ancrage finistérien perdure malgré le temps et se bonifie avec les années.

A quoi sommes-nous le plus attachés ? Aux souvenirs, à la nostalgie que ceux-ci nous procurent ?

J'aurai osé porter le deuil selon ma conscience personnelle, indépendamment des vicissitudes de l'existence et du quotidien, quitte à déplaire pour mieux se conformer à mes convictions individuelles, morale et religieuse.

Au gré du temps, faut-il s'enfermer dans le silence, vivre son deuil en solo, fuir la foule, le bruit, les supercheries d'une société artificielle ou se ressourcer dans la nature, au bord de la mer, dans un lieu qui sied le plus à votre égo ?

Telle est la question ! Interdire d'éprouver des sentiments de souffrance, de tristesse, c'est tout simplement nier ou renier l'amour que nous ont porté nos proches, nos parents .....

                                                                                                  Je refuse de cautionner une telle ineptie !




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